Je suis pour.
(et une belle citation de Michel Sardou, une)
Pour une fois dans ma vie je vais être d’accord avec notre bon ministre de l’Intérieur, que je conchie assez largement par ailleurs – notamment, il assortit ses cravates à ses chemises. Grosse faute de goût. Manuel, c’est pas possible, arrête. Ou inscris-toi à l’UMP dont tu fais de fait partie depuis longtemps, comme ça tu emmèneras tous tes petits camarades qui n’osent pas faire leur coming out et on va peut-être commencer à parler de politique de gauche – genre maintien des 35 heures, taxe sur les riches, fin des politiques d’austérités, choc social, ce genre de trucs. Enfin ce sujet me navre, je m’arrête là parce que foutredieu les enfants, ce que vous faites est me fait penser à un colimaçon: mou, tortueux, hermaphrodite et très très lent.
Mais revenons à nos moutons taureaux (ouh le jeu de mots) (facile j’avoue).
Qu’il soit bien entendu que je n’ai aucune action dans l’affaire et que je n’ai jamais assisté à une corrida moi-même. Mon avis est donc dénué de tout lien avec la pratique, ce qui comme vous le savez ne m’a jamais empêchée d’avoir une opinion ferme et bien assise. Avoir de bons préceptes sur tous les sujets et en toute circonstance, voilà qui est bien confortable.
Premier point: quelle barbarie que de piquer blesser épuiser saigner ces bêtes. Oui oui oui. J’entends. Perso, j’ai tendance à penser que ce serait pas mal de régler les quelques légers sujets liés à la torture des humains dans le monde, et pas seulement dans de primitives et lointaines contrées genre la Corée du Nord, le Yémen, la Tchétchénie, la Chine ou même nos braves amis les États-Unis (kikoo Abou Ghraib, kikoo Guantanamo! Obama tu m’as bien fait plaisir sur ce coup là!) (excellent documentaire de ma cousine à venir sur le sujet, stay tuned). Je vous parle de l’état des prisons françaises qui est déjà bien pas mal dans le genre – voilà bien le Comité anti-torture du Conseil de l’Europe qui nous met dedans à chaque inspection. Donc déjà, qu’on se sorte les doigts du cul pour les humains, les animaux on verra ensuite (sorry guys).
Que dire aussi des conditions d’élevage des vaches en batterie? Qui ne voient jamais la couleur du ciel avant de finir dans notre assiette? Qui sont perfusées aux antibiotiques et nourries de la farine de leurs propres congénères? Faire passer à des poulets toute leur vie dans le noir pour qu’ils produisent plus d’œufs, z’appelez ça comment? Torture, torture everywhere. Et ceci sans parler de l’abattage. Ce monde est suffisamment putride pour en plus se prendre la tête pour des taureaux élevés en plein air et loin de la présence humaine, qui en chient une demi-heure en tout et pour tout.
Ou alors, la meilleure solution: GUILLOTINE POUR TOUS.
Quand on pense aux 150 000 veaux (oui, les petits bébés, pas des gros taureaux) qui sont abattus tous les ans dans l’hexagone pour les bouffer, j’ai envie de rire. 500 maxi dans les corridas, ce qui nous fait un ratio de 1 taureau pour 300 veaux en batterie. Et je ne compte pas les bœufs. Ok, en Espagne le ratio est plus faible mais bon, vous saisissez l’idée générale: la corrida c’est pas vraiment le bain de sang non plus.
J’entends également l’argument que l’humanité doit progresser vers la non-violence, et que regarder torturer une bestiole excite notre instinct de bête fauve, qu’on ne se respecte pas en tuant des bêtes pour le plaisir. Kant tout ça. Bon. Je veux bien. Interdisons aussi toute forme de catharsis sanguinolente, du type jeux vidéos, films sanguinaires et compagnie – oh oui, le virtuel ne fait rien à l’affaire, si vous voulez mon avis. Je rappelle quand même que nous sommes dans un des moments les moins violents de l’histoire de notre culture européenne (voyez les guerres de religion, ça c’était du bon), et qu’aux États-Unis y z ont pas la corrida, mais quand même y a des ados qui prennent des kalachs et butent tous leurs camarades à la cantine. Donc bon. Ça donne d’excellents films (Gus van Sant I love you) mais pas beaucoup d’espoir en l’humanité. Qu’on me montre un tueur en masse qui a passé les trois jours précédents à la feria (ça m’étonnerait, il est surtout consubstantiellement bourré) (vive l’alcool).
Et puis, d’aucun m’a dit que la corrida l’a rempli d’énergie sexuelle. Oui, c’est sans doute un pervers, mais je dis: intéressant. La lonesome camionneuse va aller faire un tour. Surtout quand Manet et Picasso, qui n’étaient pas des branques un pinceau à la main, avaient l’air dans le même trip (je ne dis pas que c’était des gars bien, attention!) (mais en tout cas ils dégageaient sa mère). Lonesome Camionneuse et les bad boys. N’ouvrons pas ce chapitre.
Si dans une société idéale on ne torture pas les animaux (je veux bien), dans une société idéale il n’y a plus d’armée, plus de police non plus. Abolissons-les donc aussi. (Oui cet argument est tiré par les cheveux mais je l’aime bien) (flics et militaires, mettez-vous bien dans le ciboulot que dans un monde meilleur vous serez plutôt ouvriers du bâtiment ou bibliothécaires).
Pour dire brièvement les choses, je n’arrive pas vraiment à considérer l’abolition de la corrida comme une priorité politique: déjà, liberté, égalité, fraternité, ça va pas être de la tarte, alors si EN PLUS faut se fader les trucs de la tauromachie, soyons clairs: ça va chier dans la colle.
Retournons tous à la chasse avec la cro-magnonne, de toute façon, l’élevage, la sédentarité, c’est surfait! Let’s take the truck et à nous les grandes plaines et les steaks d’antilope bien saignants! Sommes-nous des omnivores ou des consommateurs?
Pendant ce temps, dans la plaine. Lonesome Camionneuse s’élança à travers les rangs, pareille à l’incendie qui ravage la forêt, lorsque le vent chasse les flammes en les faisant tournoyer. Elle allait en tous sens, pareil à une déesse, jusqu’à ce que la terre fût inondée de sang. Sneaky Princess, tirant son glaive, s’élança sur Lonesome C., comme un aigle fond sur un agneau. Lonesome C. aussi bondit, pleine d’une ardeur sauvage, cherchant un point du corps que l’armure laissait à découvert. Elle le trouva sur le cou, près de la clavicule, et c’est là qu’elle plongea sa pique. Lonesome Camionneuse: score! Sneaky Princess se prend la tête à deux mains. Mais elle n’a pas dit son dernier mot. Elle défendra les souris et les petits oiseaux jusqu’à son dernier souffle.
Voici une position à rebours de la pensée dominante. Sans doute auriez vous pu développer l’argument esthétique et symbolique (et croyez moi, je ne suis pas un spécialiste de la corrida, simplement une personne réceptive à ce qui dégage de cet affrontement) : la lutte entre le noir et la lumière, entre la force et l’astuce, entre le courage et l’audace, entre le Minotaure et Thésée… Mais aussi l’argument selon lequel dans notre monde bien aseptisé, combien d’occasions où l’homme simplement armé d’une épée ose défier 500 kg de muscle, et renouer ainsi avec cette grande geste (réponse : aucune occasion – on s’en fout ? – peut être mais ça a de la gueule). Tout cela sous le soleil d’après-midi, « a las cinco de la tarde », pour reprendre l’anaphore (non pas de M. Hollande), mais de Llorca…
Vous avez bien raison, mais je n’ai pas voulu faire ma snob ;)
Et puis comme je n’y suis jamais allée…
Merci!
La modestie ne nuit pas en la matière, vous avez raison (d’ailleurs entre nous, la corrida 9 fois sur 10 est une sombre boucherie, mais il reste la 10ème fois où elle parvient à se hisser très haut dans l’échelle de l’émotion). En tous cas c’est un délicieux sujet à polémique, la corrida, surtout quand la soirée mollit et que les convives enchaînent complaisamment les poncifs. Personnellement ça m’amuse !
Tout à fait: une bonne polémique quand on est bien alcoolisé, rien de tel pour finir sainement une soirée!
D’ailleurs votre blog est une mine à polémique pour fin de soirée, j’attends l’adultère, l’euthanasie, les femmes dans l’armée, faut-il se percer les oreilles/ se faire un tatouage, les avantages fiscaux donnés aux familles nombreuses, le mutisme masculin, les médecins qui prennent leurs patients pour des demeurés, la moustache…
La moustache! J’ai un avis très tranché là-dessus!
Merci pour tous ces inspirants sujets!
Que serions-nous sans nos lecteurs?
PS l’adultère j’ai déjà fait je crois https://wanderingcity.me/2012/05/28/du-cocufiage-a-lere-contemporaine/
En effet, sujet rondement traité, avec pétulance (mot aux sonorités étranges, mais qui ne doit être réprouvé pour autant) et esprit. Il aurait mérité un peu plus de commentaires (mais les lecteurs devaient être en train de ronfler devant une retransmission de corrida à la télé)
Ingrats lecteurs, en effet.
Ah que voulez-vous ce monde est injuste!
« To the happy few »…
Un lecteur qui cite Stendhal… que demander de plus?
Les mots sont la meilleure partie du plaisir ma chère, n’était-ce pas d’ailleurs une réflexion d’un séducteur vénitien ?
Je ne peux qu’approuver. C’est tout à fait stendhalien aussi, d’ailleurs.
Laissons les muets faire catleya dans un silence assourdissant
Eh bien dites, j’ai appris un mot. Et ça ne m’arrive pas souvent (hu hu hu).
Merci!
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