Comme promis la lonesome camionneuse est au rendez-vous pour vous raconter les choses de la hype berlinoise qu’elle a survolées telle un albatros majestueux (la bête est tellement au dessus de toutes les contingences terrestres que ses ailes de géant l’empêchent de marcher). En partant, elle ne savait pas encore qu’elle tomberait dans les griffes du MEN (ministère de l’éducation nationale pour les intimes) qui a présentement pour obsession de l’envoyer prêcher la bonne parole géographique à notre dynamique jeunesse de Clichy-sous-Bois, ce qui est fort bien mais rend totalement immettable la superbe robe rose qu’elle a dénichée dans une charmante boutique vintage de Schöneberg (of course on a bien fait des choses du vintage). On imagine d’ici les élèves : « Ouaiche madame tu t’es prise pour Paris Hilton ? ». Petits sacripants. L’ennuyeux dans ces situations c’est que OUI si tu t’habilles en rose tu t’es un peu prise pour Paris Hilton (bien que le pastel soit hyper à la mode encore cette saison) (enfin j’en sais trop rien mais cette robe est CANON) (laissez les albatros s’habiller à leur guise, bon sang !)
Donc on a fait amplement des choses du vintage à Berlin, parce que Berlin is la capitale du vintage, Berlin is le concept du recyclage, Berlin capitale déchirée, Berlin capitale recousue, Berlin au tissu urbain hétéroclite, concept concept quoi. Aussi, les Berlinois ne sont pas comme les Parisiens qui pensent que le moindre OBJET DE MERDE qui est passé par leurs mains est plus précieux qu’une Vénus préhistorique (à voir au musée national de la Préhistoire à Saint-Germain-en-Laye, boulasse des boulasses) (y a jamais personne en plus). Du coup on trouve des vêtements et des objets de la vie courante à des prix abordables, et je veux dire GENRE un sac de cuir magnifique à 5 euros. Et des CHAUSSURES ! Ah mes amis, la lonesome camionneuse était au bord de la syncope.
Il faut dire qu’on était bien inspirées de l’appartement extraordinaire de ma copine P. à schönes Neukölln (le chouette quartier turc), dont la déco faite de récup’, de fresques, de bois et de chaleur humaine ramène Elle décoration et Inès de la Fressange au rang de sous-Kant de bazar (je hais Inès de la Fressange, y a pas à tortiller du cul). Du coup on a acquis des choses de la décoration intérieure très remplies de vieillesse et de souvenirs : un miroir à main, un photophore bleu, une balance de cuisine, un manuel des choses de la vie, des 33 tours, une petite boîte en fer-blanc.
On a aussi amplement fait les choses de la promenade à Berlin, genre en mode STAKHANOVISTE (Walter Ulbricht, si tu nous entends, un hommage à toi et à la vitesse à laquelle tu as fait ériger ce petit muret anticapitaliste). En passant, ma copine I. a décidé de se faire toutes les Vespa de Berlin, d’où une amusante série de photos sur des destriers divers et variés tandis que la lonesome camionneuse guettait l’éventuel propriétaire avec inquiétude (la lonesome camionneuse a peur du gendarme, c’est là son moindre défaut). Il faut dire que Berlin c’est grave de la balle au niveau de la baguenaude, genre sur les bords du canal à Kreuzberg, où s’observent les hipsters à la chevelure rose (je prétends qu’un hipster à la chevelure rose n’est pas un hipster, mais I. prétend que si car c’est un allemand et les Allemands ont une vision capillaire différente de la nôtre) (vrai) (ils ne savent pas ce qu’est vraiment une chevelure).
La lonesome camionneuse a donc amplement pu faire usage des sentences sans appel qu’elle affectionne, surtout en matière d’architecture parce qu’elle s’y connaît quand même un brin et qu’elle en a rien à cirer de soûler ses compagnons de misère qui supplient à tous les coins de rue la police de l’emmener pour outrage au silence : Potsdamer Platz c’est affreux (vade retro, royaume du verre et du béton) (non mais SÉRIEUSEMENT?) (Franz Biberkopf, casse-leur la gueule!) ; ne parlons même pas de Mitte et de la Friedrichstraβe (ignoble centre commercial de luxe à ciel ouvert) (Jean Nouvel tu paieras pour ces Galeries Lafayette de merde) ; Prenzlauer Berg n’est plus ce que c’était (sans dec’ on se croirait à Soho ou dans le Marais, alors qu’il y a quelques années encore les bâtiments partaient en ruine sous de sympathiques graffitis). Bref y a du relâchement quand même. On se demande quand les villes seront un peu faites pour les gens et pas pour les consommateurs (oui je sais, ma hauteur de vue n’a d’égale que ma légitime indignation) (votez Logement social, les gens !).
Bien naturellement, à Berlin on a aussi copieusement fait des choses de la bière, de la saucisse et de la Kartoffelsalat. La lonesome camionneuse en a un peu chié niveau estomac car elle n’aime pas trop la bière (oui oui on sait, comment est-ce possible pour une Alsacienne ?) (vous emmerde). Mais la Kartoffelsalat du petit bistro de Neukölln, mes enfants ! Elle était presque meilleure que celle de ma grand-mère. Eh ouais, les Allemands ne savent pas trop faire grand chose niveau bouffe, mais quand y du porc, de la patate et du chou, c’est parti mon kiki ! Ce qui est bien, de ce fait, c’est que les hipsters locaux ne sont pas trop en mode bars branchouilles et se contentent de Biergärten au bord de l’eau, ce qui fait que les simples mortels peuvent assez facilement les côtoyer sans crainte.
Pour finir, évidemment à Berlin on a pas mal fait les wannabe branchées. Mais bon, ça n’a pas trop marché. Faut dire que le niveau de hipsteritude y est tellement élevé que c’est fatiguant rien que d’essayer. Imaginez, ces gens ont des distributeurs d’art dans la rue (2€ ça va, c’est dans mes moyens)
ainsi que des olympiades des hipsters (à ce propos, je me rends compte que je devrais comme tout le monde regarder les JO, cette sympathique confrontation des Nations où la compétition individuelle est érigée en modèle de vie) (mais je me contente de faire la vaisselle, de réfléchir à des choses de bricolage et de lire Montaigne) (parfois je me demande ce qui ne marche pas chez moi).
On a quand même un peu entamé des trucs de la branchitude, genre on est allés voir une pièce de théâtre shakespearo-utopio-gargantuesque vraiment de la boulasse dans le Görlitzer Park mais on est partis avant la fin parce que d’aucuns avaient mal aux pieds et ne comprenaient pas assez bien l’allemand (c’est une pièce bilingue en Allemand et Anglais) (perso je pigeais très bien) (mais bon, je conçois que tout le monde n’est pas fluent dans ces deux langues, hu hu hu). On est aussi allé voir l’expo Diane Arbus du Jeu de Paume au Martin Gropius Bau, parce que y avait pas la queue, et que ça fait quand même plus classe dans la conversation de balancer « Diane Arbus ? Je l’ai vu à Berlin, à Paris il y avait beaucoup TROP de monde. » Plutôt que de se consacrer à de la musique ultra dans le ton, on a vu nos potes Américains qui nous manquent toute l’année et sont attirés par la hype berlinoise comme les papillons par la bougie, et on est bien restés manger de la Kartoffelsalat en discutant de trucs de théâtre que j’y comprends rien mais maintenant je sais quelles interjections lancer dans la conversation quand apparaissent les sobriquets de Castellucci ou d’Ostermeier. Eh ouais.
Sur ce je vous quitte, Michou (the Montaigne one) me fait de l’œil.
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