Des trentenaires sans enfants

Pardonnez ma dissipation, il est vrai que j’écris plus rarement sur ce blogue ces derniers temps mais, outre que j’ai du travail (ce qui est tout de même assez contrariant), j’ai mis un certain temps à me remettre de l’annonce que Sophie Marceau sort avec Cyril Lignac. Y a plus de respect.

Vous serez étonnés, je vais disserter des problèmes logistiques rencontrés par les femmes célibataires ayant dépassé la trentaine ; un sujet que j’aborde rarement, tant je suis le modèle de la mère de famille idéale vivant dans un pavillon périurbain avec deux gosses et une femme de ménage, mais il faut écrire pour tout le monde ne voyez donc pas la moindre critique dans mes paroles ces femmes ne sont sans doute pas anormales au fond, m’enfin un peu quand même.

En effet, lors d’une soirée où j’avais appris que Jeanine avait accouché du troisième et Germaine de jumeaux (car j’ai l’œil affûté, je fais des sciences sociales), alors que je commentais que franchement dans mon entourage il y avait beaucoup d’enfants (dont un certain nombre au prénom ridicule, mais ça c’est pas trop mon problème, keep up Jézabel) surtout que mon ex vient d’en pondre un, merci la life (je vous passe les détails de cette horrible sensation connue sous le nom de « j’ai raté ma vie j’aurais dû rester avec Gérard qui certes me trouvait trop grosse mais aurait fini par m’engrosser » (brillant jeu de mot)), la meuf à côté de moi me dit « Ah ben oui c’est sûr, à notre âge il vaut mieux s’y mettre si on veut en avoir ». Connasse. Moche en plus. Il est à toi le  gamin obèse là-bas? Ah d’accord. Il a pas l’air bien dégourdi, pauvre gosse. Tu crois peut-être que je fais exprès de ne pas rencontrer le père de mes enfants et de me fourvoyer à tomber amoureuse d’hommes qui ne me rendent pas la pareille ? Alors oui peut-être, à un niveau psychanalytique profond, certes ; enfin moi je ne te fais pas remarquer l’injustice du fait que tu es maquée alors que moi macache. Vu que tu as l’air d’une personne assez délicieusement sensible aux sentiments d’autrui. On dirait que parce que t’es célib sans gamins tu menaces la paix mondiale. Et (fait certes rare) je n’étais même pas en train de me plaindre! Je veux dire sans déconner, on peut pas nous foutre la paix cinq minutes merde?

Happy-Not-A-Mothers-Day-to-Every-Woman-Without-Children

#PiègeMortel

Mon ex a eu un enfant, mon amant a deux enfants, mon petit frère a un enfant, vous allez voir que bientôt mon cousin, qui ne veut pas d’enfants, va avoir un enfant (ou pas, cousin je compte sur toi, ne me laisse pas occuper seule le trône de l’héritière indigne incapable de pondre pour perpétuer le nom et la race familiale, certes supérieure mais on fait comme on peut) (et au passage un merci à mon frère pour avoir perpétué l’espèce, ça a diminué la pression familiale).

Attention, je ne suis pas totalement une pute aigrie, je suis sincèrement contente pour toutes mes copines enceintes, je m’extasie sur la première dent du petit (enfin j’avoue maintenant je suis un peu blasée, sauf pour mon neveu qui est un génie bien entendu), j’offre des cadeaux de naissance comme il faut, je veux bien gardienner à l’occase, je fais des bisous, toussa toussa, mais merde un peu de respect pour ma situation aussi les gars. Et encore j’ai de la chance, mes copines ne sont pas du genre à me raconter leur épisiotomie ni à s’extasier sur la consistance du bavoir du petit Valère. Mais tout de même, tous ces bébés mignons, ça érode l’estime de soi quand on en voudrait soi-même. Et je ne parle même pas des femmes qui ne veulent pas d’enfants. Des suspectes, des salopes égoïstes, elles disent ça maintenant mais elles changeront d’avis un jour (euh… et si on la laissait décider, et puis moi je peux comprendre, faire des gosses dans le monde d’aujourd’hui hein… enfin moi jdcjdr).

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Bref, les meufs sans mioches dans ma génération ça commence à devenir suspect, à sentir le roussi, la névrose et la louse, surtout quand t’as pas de mec (auquel cas tu peux toujours te défausser d’un habile « mon copain ne veut pas » accompagné d’un regard triste) (j’avoue ça doit être chaud à gérer si c’est vrai, vu que si tu le quittes tu te trouves dans la situation décrite dans ce post et là c’est chaud bonbon, mais bon, je ne vais pas non plus plaindre les gens en couple, faudrait pas trop pousser Mémé dans les orties). En conséquence, confrontée à toi (la célib infertile) en soirée, la gent masculine propose deux interprétations de la situation : 1. c’est une chaude du cul instable, faut que je me positionne pour me la faire (et après quand tu dis non on te prend pour une anormale) (mais pour qui tu te prends tu parles de cul en soirée et après tu veux pas baiser) ou 2. elle est prête à tout pour se caser et faire un gosse, je la saute et je me barre direct (quelques habiles questions/remarques permettront éventuellement de la déminer, genre « ça fait longtemps que tu es célibataire ? » ou « moi je ne cherche rien de sérieux », merci mec ça me touche, au moins les choses sont claires).

Ces situations peuvent d’ailleurs déclencher des crises d’angoisse chez le sujet concernée (oui, car c’est une femme), qui se traduiront par diverses manifestations comme boire beaucoup, puis glousser en disant « je suis bourrée », parler beaucoup puis glousser en disant « je suis bourrée », ou partir en urgence à la recherche d’un bocal de cornichons (une vraie passion qui me redonne la joie en toute circonstance) (avantage : après ton haleine de chacal te préserve de tout désir masculin mal venu), car toutes les occurrences où tu dis « je suis bourrée » sont interprétées en face comme « la voie est libre », bien entendu. Si j’avais l’esprit simpliste et que je méprisais les hommes (ce qui n’est pas mon cas of course), je dirais que ne pas avoir d’enfants et faire montre d’un certain épanouissement sexuel t’assimile direct l’étiquette « grosse teupu » (une étiquette qui t’est d’ailleurs accolée sous de nombreux prétextes, notons-le tout de même). Plaisir de l’égalité des sexes, parce que je sais pas pourquoi mais je sens vaguement que c’est pas pareil pour les mecs.

Voilà, hein, je ne me plains pas mais quand même, WTF. Merci bisous lol.

Le second marché

C’est pas tout ça les amis, le temps passe, on se fait vieille, les ovaires moisissent, faut se caser nom d’un nain borgne ! Le monde est une jungle à la compétition impitoyable, et trouver un homme, comme le suggère le nom de ce beau site dédié à l’Amour et à la Poésie, « Adopte un mec », s’apparente à un supermarché. CEPENDANT ne croyez pas que ce supermarché des mecs se compose de rayons débordants de multiples produits de marques diverses et variées, où tu peux choisir tranquillement et passer sans coup férir de la conserve de petits pois au poulet de Bresse AOC. D’une part parce que, reconnaissons-le, tu n’es pas de première jeunesse et tu es PEUT-ÊTRE un peu tout petit peu chiante. Légèrement. Bon. C’est une difficulté. L’autre difficulté, c’est que le rayon, de fait, est plutôt constitué de légumes défraîchis et de yaourts périmés. Ce qu’on appelle LE SECOND MARCHÉ. Les mecs sur le retour, quoi. Attention, ne nous y trompons pas, le yaourt périmé peut être tout à fait mangeable, à condition d’y mettre un peu de travail et de bonne volonté (il devrait y avoir une épreuve de Top Chef sur le sujet). Mais enfin, ça ne vient pas tout seul. C’est même parfois BIEN GONFLANT. Car d’une manière ou d’une autre, les gens du second marché ont une perception vaguement tordue de l’amour et du couple (moi-même, il se peut que… bon hein voilà hein, j’ai donné, j’ai perdu, j’ai souffert, j’ai abusé, j’ai déconné, bref).

Toi qui as brûlé ton coeur aux feux de l'amour.

Toi qui as brûlé ton coeur aux feux de l’amour.

Voici quelques types de planches pourries du second marché que je propose à votre analyse (j’aime bien classer, c’est ma nature) :

Le divorcé potentiel qui cherche une jeune. Parfois encore enterré sous les jupes de son ex qu’il trompe souvent depuis des années, il cherche vaguement le petit cul bien ferme qui le fera renoncer au confort de son intérieur bourgeois. Challenge masochiste en vue, car le type ne quittera pas forcément sa femme pour toi, et tu risques de te retrouver longtemps à traîner à ses basques comme une âme en peine. Mais peut-être que ça va marcher et que le gars va se barrer. Tout est dans le peut-être. Laisse-moi te dire que tu risques de t’épuiser en stratégies (« si je lui demande de quitter sa femme ça fait ultimatum donc il risque de se barrer » – eh ouais, raison de plus si vous voulez mon avis – « ok je vais l’attendre jusqu’au mois prochain, non encore six mois, un an, etc. etc. car il me dit qu’il m’aime» – ah le sacrifice de l’amour – « je vais me taper d’autres mecs pour faire passer le temps » – kikoo la dépression) tandis que le gars, tout en protestant qu’il n’aime plus sa femme, lui fait un troisième chiard sans coup férir, ce qui rend la situation encore plus fun vu qu’un divorce potentiel lui coûterait sa voiture et sa Rolex. Mais bon. Saurais-tu lui arracher la victoire et le divorce tant attendu, tu te retrouveras sans doute embringuée dans des histoires de garde d’enfant plus compliquées que la théorie des cordes et plus destructrices psychologiquement que la conquête de l’Himalaya. Tu verras aussi émerger la figure de l’Ex, mère des enfants, qui deviendra ton Ennemie absolue tandis que tu construiras ta vie de belle-mère en filant en douce de la guimauve aux gosses vu que leur mère la leur interdit. Bref, y a du boulot. Et n’oublions pas que vu le contexte de votre mise en couple, le gars peut toujours réitérer après avoir tâté le terrain, et se barrer avec une nouvelle meuf. Plus jeune. Ou, pire, PLUS VIEILLE.

Le séparé perdu. Tout se présente bien dans le tableau, il s’est séparé de la mère de ses enfants depuis plusieurs années, il a l’air tout mignon de chercher l’amour et tout et tout. Il a même l’air de bien t’aimer. Mais bon. Tout à coup le maelström se réveille dans sa tête, et il retourne se cacher dans sa tanière parce qu’il ne « sait pas où il en est ». Aïe. Nœuds au cerveau. Constitués sans doute d’ex, de crise de la quarantaine et de la virilité post-moderne. Mais ne lui jetons pas la pierre ; toute personne qui se fait des nœuds au cerveau (il se peut que je m’en fasse plutôt pas mal) comprendra ce fonctionnement. DAMNED NŒUDS AU CERVEAU.

Le frustré de la life qui cherche une béquille. En couple depuis 15 ans, il se rend compte avec le temps qui passe que sa vie n’est pas si rigolote et qu’il n’est plus amoureux de sa meuf avec qui ses seuls projets sont ses plans de vacance. Mais le bougre est bien tranquille chez lui, dans son bel appart’, et n’aime pas du tout l’idée de se retrouver tout seul devant sa télé le soir venu. C’est là que vous intervenez. Après avoir tâté le terrain, il se rend compte que vous vous intéressez à lui, il commence à se confier à vous et vous fait comprendre que si vous êtes prête à sortir avec lui, banco qu’il quitte sa meuf. SANS TRANSITION. Oké. T’es pas obligée de dire oui. Surtout qu’il y a fort à parier que le gars se complaise dans ses propres problèmes et n’aie pas vraiment de temps à te consacrer, vu que le pauvre est en pleine rupture. Il va falloir que tu t’occupes de lui à plein temps, pas de temps pour tes petits problèmes à la con. Plaisir des débuts de la vie amoureuse. Outre que tu vas passer pour la salope locale. Enfin bon, ça peut pimenter ta vie sociale. Chacun ses goûts.

Le dilettante. Pas de hasard, si le gars est célib’ à 35 ans sans avoir vécu de relation sérieuse, c’est qu’il est plutôt du genre papillonnant. S’il est amoureux de toi, il va te promettre monts et merveilles de la vie de couple (enfants, principalement), sans jamais te donner de signes réels de ces amples développements discursifs ; l’engagement maximal dans son monde réel consistant en une semaine de vacances. Il a beau vouloir changer, il n’y arrive pas, le pauvre bougre, et pour cause, il déjeune recta tous les dimanche midis chez sa mère et pense que le psy c’est pas pour lui. D’ailleurs l’indépendance est une forme de santé mentale (personnellement j’ai tendance à parler d’atomisation de l’individu). Et encore, on décidera au dernier moment. A choisir si deux soirées par semaine te suffisent. N’en attends pas trop. Some men are islands.

Sur ce, vogue la galère. Bon courage. Il en faudra.

Remarquez que j’ai dit le « second » marché ; si je dois un jour passer au troisième, je ne réponds plus de rien.