La peluche, objet transitionnel des petits nenfants qui ont besoin de chaleur humaine. Mais pas que. Ceci est un hommage et un manifeste en faveur de la pratique de la peluche à tout âge. Y a pas de raison.
Oui, la peluche est utile, elle nous rappelle notre maman, le sein maternel, des trucs de l’enfançon que nous fûmes. Comme on n’est pas des bœufs, un homme sympathique et servant la science avec l’ardeur du sacrifice a fait des expériences intéressantes sur la question avec des petits singes : quand tu nourris un bébé singe avec un biberon en plastique et sans aucun contact animal, son cerveau clamse, plus personne dans le plafond ; par contre, avec un biberon enveloppé dans une peluche, il survit. CQFD, sans peluche nous sommes morts. Certes, la pratique de la peluche à l’âge adulte pourrait sembler futile, voire attardée, voire névrotique. Je ne suis pas Freud mais je sens que le gars aurait désapprouvé. En même temps il avait une barbe – et qui peut dire ce qu’il en faisait la nuit tombée? Il est bien facile de condamner la peluche quand on se caresse la barbiche. Ce que j’en dis.
Soyons réalistes : tou(te)s les célibataires en manque d’affection ont un jour caressé l’idée d’adopter un chat/chien/serpent/mulot (chacun sa merde) pour lutter contre la solitude (ou alors vous laissez la télé allumée, avouez). L’avantage de la peluche, par rapport à ces projets pouvant aisément déboucher sur le destin de vieille femme à chats, c’est que ce n’est pas VIVANT et donc parfaitement adapté à un usage discret et pratique : pas besoin de s’emmerder pendant les vacances, ni d’avoir peur de finir bouffée par ses clebs, ni de raconter la life de ton chat au bureau (elle met du vieux pain sur son balcon/pour attirer les moineaux les pigeons – comme le chantait JJ Goldmann idole de ma jeunesse). Et quand un impétrant potentiel (UN MEC, UN MEC, UN MEC !!) (oui, t’as beau faire, cette saloperie de mythe de prince charmant laisse de profondes séquelles dans ton cerveau pourtant fécond (que tu crois) (oui je suis une princesse, au fond)), quand donc (pardon pour la parenthèse) un impétrant potentiel se présente enfin au portillon, la peluche se remise aisément dans un tiroir, alors que le chat proclame avec un peu d’insistance à la face du mec monde que la solitude te pèse un peu malgré tes airs farauds de « je suis trop une meuf indépendante » (ne nous voilons pas la face, la possession de peluches à l’âge adulte est légèrement genrée).
Attention! Bien sûr je ne parle pas de N’IMPORTE QUELLE peluche. Il existe des peluches décoratives de luxe représentant des animaux sauvages dans des postures savantes. Ces peluches sont magnifiques (et chères) mais ne sont pas matériau transitionnel potentiel, ce que l’on pourrait vulgairement appeler doudou dans le langage simplifié pour les enfants (que je réprouve, mais il faut parfois sacrifier la beauté du verbe à la précision du langage). Il y a ensuite LA peluche: peluche à bisous, peluche tout doux, peluche qui a une histoire, peluche qui a un nom, ta compagne de tous les jours enfin (plutôt de toutes tes nuits, finalement).
Intérêt objectif de la peluche, en un mot comme en cent :
1. Tu ne dors pas TOTALEMENT seule. Oui je sais, nous sommes des femmes fortes et indépendantes, mais on nous a quand même bien dressées à avoir besoin d’affection. La peluche c’est tout doux et ça ne demande AUCUNE contrepartie. Ca ne s’en va pas le matin. Ca ferme sa gueule. C’est un bien agréable compagnon de vie. En plus ça prend pas de place et faut pas la nourrir.
2. Intérêts pratiques divers : à caler entre les seins, sous le ventre, pour se caler la tête… La peluche vous promet des nuits plus agréables, parce que nous ne sommes pas des bûches.
3. Tu peux donner libre cours à ton amour des lolcats, et de tous les animaux mignons de l’internet que tu n’oses pas trop mettre en fond d’écran de peur de perdre pour toujours ta crédibilité de business woman. Tu peux être l’heureuse propriétaire d’une marmotte, d’un loup, d’un rat, d’un lapin, d’une panthère, d’un sharpei ou d’un cocker sans avoir besoin de te prendre la tête à réfléchir à la protection de la faune sauvage et des enjeux éthiques de la domestication animale.
4. Si t’aimes le poil, voilà du poil. L’appel du poil est parfois lancinant, on peut le comprendre sinon l’approuver.
5. En l’absence de petits enfants à utiliser comme objet transitionnel de ta vie ratée (non je ne juge pas), tu peux donner libre cours à une frénésie baptisante sans faire souffrir à vie une personne parce que tu l’as nommée Mao ou Marie-Bérangère.
Longue vie et poils à Emile, Marcelle, Michel, Jean-Loup, avec les remerciements de Mademoiselle Babouchka et de l’Emmerdeuse.