Prendre le train / Take the train

“Dis, Blaise, sommes-nous bien loin de Montmartre?”

Les inquiétudes
Oublie les inquiétudes
Toutes les gares lézardées obliques sur la route
Les fils télégraphiques auxquels elles pendent
Les poteaux grimaçants qui gesticulent et les étranglent
Le monde s’étire s’allonge et se retire comme un accordéon qu’une main sadique tourmente
Dans les déchirures du ciel, les locomotives en furie
S’enfuient
Et dans les trous,
Les roues vertigineuses les bouches les voix
Et les chiens du malheur qui aboient à nos trousses
Les démons sont déchaînés
Ferrailles
Tout est un faux accord
Le broun-roun-roun des roues
Chocs
Rebondissements
Nous sommes un orage sous le crâne d’un sourd…

Blaise Cendrars, Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France, 1913.

« Blaise, tell me, are we really a long way from Montmartre? »

Anxieties
Forget your anxieties
All the stations with cracked walls leaning over the rails
The telegraph wires on which they hang
The grimacing poles that make gestures and strangle them
The world stretches itself, elongates and snaps back like a harmonica
played by a sadistic hand
Through fissures in the sky, enraged locomotives
Go crazy
And in the gashes
Vertiginous wheels mouths voices
Mad dogs bark at our heels
Demons unchained
Scrap heaps
A mock agreement
The broom-vroom-vroom of wheels
Shock
Recoil
We are a storm in the head of a deaf man…

Blaise Cendrars, Prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France, 1913, translation Donald Wellman.

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