Des dangers de se maquer

Tandis que mon plus fidèle ami qui a même quasiment réussi à me faire acheter une étagère à 500 balles (car mon cerveau est, hélas, plus que disposé à se prostituer), me rappelle opportunément que mes fidèles lecteurs n’ont « pas entendu parler de moi depuis longtemps » (oui je veux bien parler de facebook, facebook est mon plus fidèle ami, non je n’ai pas d’amis, oui j’aime me plaindre), je me rends à cette douloureuse évidence : je n’ai rien à dire. Non pas que je sois la seule à écrire des pavés pour ne rien dire, mais je ne suis pas totalement une pute amorale et franchement, ces derniers temps rien à signaler : un défilé de mode aux Folies Bergères (passons sur mon indignité tellement j’étais au TAQUET), un de mes élèves en garde à vue, François Fillon tout nu et pas bronzé, la préparation des bacs blancs grosse folie pendant que tout le monde boit des coups en terrasse. L’actualité n’est pas folichonne ; ne nous voilons pas la face.

J’ai donc décidé de prendre un sujet à bras-le-corps, à savoir l’enjeu tout entier de l’existence de ce blogue : le célibat. Car finalement, si la société m’amène à penser que je suis une merde indigne d’exister parce que je n’ai pas de mec, c’est bien son problème (et le mien). Par ailleurs, damned, me dis-je, ai-je vraiment envie d’avoir un mec ? Non parce que je fais genre mais je ne suis pas non plus totalement incasable quoi qu’en pense ma grand-mère. C’est donc qu’en moi quelque chose résiste (quelque chose en moi ne tourne pas rond, résiste, prouve que tu existes, etc. etc.), mais quoi ?

Dès lors, me suis-je demandée, d’un point de vue purement pragmatique, ai-je intérêt à avoir un mec ? On me rétorquera « mais l’amour, gna gna gna » moi je veux bien mais sans déconner les gens, on vit dans le monde le plus utilitariste de l’Histoire, et vive la reproduction sociale. Bon. Moi je vis avec mon temps.

La question du réveil est à l’évidence l’une des plus délicates que l’on puisse imaginer, étant donné que se réveiller avant 9 heures est selon moi un crime contre l’humanité, une vision qui n’est partagée ni par Nicolas Sarkozy, ni par la majorité des employeurs hélas. Alors que, ne faisons pas l’autruche, dormir c’est la vie (si vous n’êtes pas d’accord, libres à vous, mais sachez que je vous enveloppe de mon intégral mépris) (même si j’ai bien conscience que ça vous en touche l’une sans faire bouger l’autre), il s’agit donc ici d’envisager d’avoir son sommeil perturbé par une entité (le « mec ») susceptible de provoquer divers désordres dans le sommeil : ronflements, mouvements nocturnes et surtout, horreur, le réveil nécessaire pour arriver à l’heure au travail. Oui parce que la plupart des gens se lèvent avant 9 heures. Même moi, ça m’arrive, mais dans ce cas je m’en plains abondamment à l’humanité qui m’entoure. Cruauté. Torture. On notera cependant un avantage éventuel : trouver tout disponible un homme à qui se plaindre des divers défauts de ma vie, qui sont grands et nombreux. Vous me direz que cela nous ramène à un autre problème, qui est de GARDER le mec. Eh bien, chaque chose en son temps. Audaces fortuna juvat (j’aime émailler mes élucubrations de citations latines, je trouve que ça fait meilleur effet, cela les sériosifie en quelque sorte).

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L’un des autres désavantages de la mise en couple (et plus encore de l’emménagement) est de ne pas pouvoir, à terme, cacher à l’autre l’ampleur de ses fautes de goût. Autant au début d’une relation passeras-tu systématiquement une heure dans la salle de bains ex ante, et feras-tu péter le shorty en dentelle noire qui te gratte le cul, autant la culotte de grand-mère risque de repointer rapidement le bout de son nez. Et sera-t-il possible d’écouter Britney à fond les ballons dans le salon ? VOIRE d’avouer mon appétence pour la chanson phare de Frozen, Let it go, passion que je partage avec toutes les fillettes de moins de 6 ans de ce pays (même si, faut pas déconner, je l’écoute en anglais) ? Faut-il que je cesse de me présenter comme une femme raffinée et intellectuelle ? En même temps, je vais pas faire semblant, j’aime Disney ET Stendhal ET Bourdieu ET Britney (Work bitch !).

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Ces mêmes sexistes sont tout à fait scandaleux, mais c’est l’idée.

Dans cette même catégorie se placent un certain nombre d’activités que l’on pratique, comme le dit la sagesse populaire, « avec un plaisir coupable » : se couper les ongles dans son bain, s’épiler fébrilement au milieu du salon, changer les draps alternativement tous les deux jours ou tous les trois mois, boire du coca light à tous les repas, se nourrir de pâtes japonaises déshydratées. Car enfin qu’est-ce que l’homme dans la nature ? Un néant à l’égard de l’infini, un tout à l’égard du néant, un milieu entre rien et tout.

Mais enfin, on a beau dire, le néant et l’infini, on n’a pas non plus des apparts extensibles à Paris ce qui nous amène à un insoluble problème, celui de la place. Faire de la place pour un homme, soyons lucides, on n’est pas rendus (j’ai l’impression de passer tout ce post à expliquer que je suis en train de dévoiler la Vérité : tout soudain, cela me semble louche, extrêmement louche, mais passons). Après un rapide calcul estimatif, il appert qu’il me faudrait, pour laisser la place aux frusques d’un homme dans ma penderie, renoncer à la moitié de mes robes, jupes, chemises, t-shirts et autres futilités fondamentales. Effroi. On a beau se proclamer révolutionnaire, on s’attache à ces petites fripes, à ces attestations de notre existence sensible, à ces tributs de la boboïtude.

Bref, c’est terrible, si je veux vivre avec un homme, va falloir faire de la place ; moi qui aime tant m’admirer en tête à tête avec moi-même ; si c’est pas malheureux.

Il va falloir qu’il soit vraiment exceptionnel, cet homme.

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Considérations inactuelles sur les lunettes

Parfois il faut se rendre à l’évidence : je bigle. Vous me direz que je dois bien m’en rendre compte quand j’enlève mes lentilles tous les soirs : certes, j’ai bien conscience que voir net dans un espace compris entre 5 et 15 centimètres seulement de mon nez n’est pas des plus pratiques. Néanmoins, on oublie facilement ce disgracieux instrument de souffrance esthétique, étant donné qu’il séjourne sur notre nez, et reconnaissons qu’il est peu de moments dans la journée où l’on a pleinement conscience de son nez.

On me rétorquera que les lunettes donnent l’air intelligent. Je répondrai d’abord que merci les persécutions dans la cour de récré parce que t’as l’air d’une polarde (je n’ai subi absolument aucune persécution dans la cour de récréation mais j’aime à me construire une image de martyre, sinon les gens seraient vraiment trop jaloux). Je rétorquerai ensuite qu’ « avoir l’air » on s’en bat bien la race, et que personnellement je me flatte de l’être sans lunettes tout autant qu’avec, d’autant plus que quand tu es fortement myope l’effet loupe créé par les verres réduit tes yeux à la taille de deux têtes d’épingles, ce qui n’est pas évident pour pécho – tout le monde sait que les hommes regardent essentiellement les femmes dans les yeux, que j’ai fort jolis d’ailleurs (et c’est pas pour me vanter).

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Chien à lunettes qu’il me semblait pertinent de poster ici.

Comme me l’a dit samedi dernier dans un bar un homme fort éméché: « toi avec les culs de bouteille que tu te paies tu dois pas voir grand chose » – ce qui confirme mon intuition que pour les soirées drague il vaut mieux éviter d’arborer ces disgracieux appendices et se rabattre sur les lentilles. Ça tombe bien, c’était pas une soirée drague, mais ce brave garçon s’est senti obligé de me tenir au courant que j’avais aucune chance de scorer ce soir-là, c’est vraiment sympa de sa part d’autant que je ne le connaissais ni d’Adam ni d’Ève.

Il est vrai que les lunettes, aussi hideux que soit en général cet accessoire (car ne nous voilons pas la face : les lunettes c’est laid), peuvent permettre de mettre le monde à part, dans une brume cotonneuse, ce qui peut être pratique en certaines occasions. Au hasard (vraiment tout à fait, j’ai tiré au sort), prenons l’exemple des relations sexuelles. Enlever ses lunettes d’un geste gracieux et pudique permet de laisser penser à la personne interagissante que vous voulez vous montrer sous votre meilleur jour, que vous la laissez un tant soit peu entrer dans votre intimité, enfin bref tout un tas de trucs super vulnérables, alors que quoi de plus pratique en réalité quand, pour une raison x ou y (trop bourrée, amoureuse d’un autre, besoin de récapituler intérieurement tes courses de la semaine) tu éprouves le besoin de ne voir l’autre que dans un flou bienfaisant ? À nous les myopes les séances de baise avec Michael Fassbender, Joshua Jackson, Patrick Swayze (oui je suis vintage) voire Vin Diesel (chacun ses préférences, je ne juge pas) ! Pratique quand tu as envie d’échapper à Marine Le Pen ou à Manu Macron sur ton écran télé (le problème c’est quand ils crient).

L’effeuillage de lunettes : la solution la plus simple pour se voiler la face. Merci, sort apparemment cruel, de m’avoir doté de la vue d’une taupe anémique. Bon, je me suis pris un lampadaire dans la figure quelque fois, mais ce n’est finalement qu’un léger inconvénient pour s’éviter de mater la laideur du monde.

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Relooking de l’extrême

Sur ce je viens de réaliser que ceci est le troisième post que je rédige sur la question de la myopie et des lunettes, et que je suis donc d’une prévisibilité et d’une absence d’originalité qui frisent la pulsion suicidaire bloguesque, puisque je sais bien, chers lecteurs, que vous venez chercher ici du frisson et de l’aventure et non pas d’inépuisables arguties sur mes binocles. C’est pas non plus comme si elle se bousculait au portillon, l’aventure ! Tout cela s’explique hélas facilement par la générosité de notre belle sécurité sociale, qui me rembourse royalement 2 euros par verre tous les deux ans, ce qui me pousse à la consommation frénétique de montures de lunettes et, suite à ma frustration (car c’est fort laid, une paire de lunettes), à rentrer chez moi et rédiger fébrilement un brame de frustration face à mon handicap.

Donc voilà, aujourd’hui je suis allée acheter des lunettes. Circulez y a rien à voir.