Un sujet de la plus haute importance (une fois n’est pas coutume) va nous occuper aujourd’hui, alors que les températures clémentes nous ont fait quitter bonnets et chaussettes. Vous voyez où je veux en venir : sans chaussettes vient la saison des ampoules (OUH LA TRANSITION DE FOLIE), et se rappelle à nous le triste sort de nos pieds de femelles torturés sublimés par les chaussures féminines par excellence, j’ai nommé les chaussures à talon. Ouais parce que les Chinois, ces dégénérés, eux ils déformaient les pieds des femmes ; nous on est vachement plus subtils, on les perche sur 12 cm de piédestal. En effet, ce détail de la chaussure est quand même trop de la boulasse intergalactique. D’abord, voilà les ampoules (ma tactique du moment, alterner les chaussures de sorte que les ampoules se forment à des endroits DIFFÉRENTS : astuce !) (fortune des marchands de sparadrap, exploiteurs du pauvre monde). Ensuite, kikoo le mal de dos et de l’arche transverse de la plante du pied (merci wikipédia). Bienvenue dans le monde des cors et des tendinites. Sans déconner, même avec des Louboutin, tu finis par en chier ta race (légende urbaine des « chaussures de marque qui font pas mal aux pieds » : 12 cm c’est 12 cm, point).
Grosse subtilité du moment où la douleur commence à être insoutenable et où tu essaies vainement de ne pas adopter une démarche de canard pour ne pas trop te taper la tchoufe. Sans compter ces imbéciles d’urbanistes qui parsèment le trottoir de grilles ou de pavés ridicules. Et je te parle même pas des graviers, ni de l’usage des talons sur pelouse (kikoo les cocktails de mariage dans les prés). A plus de 10 cm, la chute est probable. Pense à mettre une culotte. Tu anticipes déjà l’air réjoui de ton cordonnier en te voyant ramener pour la 4ème fois ta paire d’escarpins à ressemeler pour 10 €. Ces bestioles entretiennent une INDUSTRIE.
Etant extrêmement cohérente / anti-consommation / pas superficielle / féministe comme une hyène (oui souvent, quand tu dis que tu es féministe, tu vois s’allumer la peur dans les yeux d’en face et tu te sens comme Ed avec son rire hystérique de hyène soumise) votre servante est particulièrement friande de l’objet et dispose d’une quinzaine de paires ce qui est somme toute extrêmement raisonnable eu égard à ses nombreuses obligations sociales (aller faire les courses au Bio c bon, boire des coups avec ses copines, regarder Roland Garros sur le canapé). Il fut même un temps où je ne mettais QUE des chaussures à talons. Grosse technique. Des heures d’entraînement sur parquet. Et je te parle même pas de la descente d’escaliers.
Mais, POURQUOI ? Pourquoi s’infliger tant de douleur ? Pourquoi tant de haine ? N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?
D’abord, ne sous-estimons pas le masochisme de chacun. La névrose n’est jamais loin dans notre monde impitoyable. La pression de la mode n’est pas rien non plus ; quoique j’avoue avoir assez peu de pitié pour les ignobles perchoirs aiguilles à plate-forme arborés par certaines pouffes dont j’apprécie certes la musique mais moins les errements vestimentaires.
Cependant, le cœur du sujet serait la féminité. Il faut dire que depuis le XVIIIème siècle, les hommes ont lâché l’affaire (pas cons, les mecs !) – sauf Vincent MacDoom, big up Vincent, un jour tu seras compris. Les talons ont en effet cette vertu de faire paraître tes chevilles plus fines et de faire sortir tes fesses et tes seins. DONC tu te sens plus féminine. Ca fait kiffer les gars. T’as l’impression d’avoir grave le mojo de la drague. Tout de même, j’ai noté une difficulté (certes spécifique) d’utilisation : les hommes petits. Parfois ils n’aiment pas trop quand tu es plus grande qu’eux avec tes talons de femme fatale. Bien sûr ils ne le disent pas, ça la foutrait mal d’avouer qu’ils sont complexés. Du coup il faut deviner. Il faut être subtile. Tout à fait mon rayon.
Autres subtilité, la richesse lexicale de la chose est somme toute sinon rebutante, du moins déroutante : du stiletto au compensé en passant par le kitten, la plate-forme, le Louis XV ou le cubain ; le néophyte s’y perd. On est allé jusqu’à commettre le crime suprême, les BASKETS À TALONS. Win the yes needs the no, to win against the no, comme le disait si justement Jean-Pierre Raffarin. Le mâle, cela dit, s’en fiche un peu, du moment qu’y a du résultat. C’est la loi du terrain.
Ah, et puis aussi, paraîtrait que comme tu peux te casser la gueule ça donne aux mecs l’illusion que tu es plus fragile, en même temps que le talon peut symboliser la femme de pouvoir. On s’y perd. Enfin ça sent plutôt le consentement des dominés à la domination que le girl power. Et je ne parle pas de nos amis de la fétichisation des cuissardes lacées. Chacun ses goûts, comme dirait Kant.
En même temps, y a pas à chier, on se sent plus de la femelle avec que sans. Personnellement j’ai jamais pu me faire aux pulls péruviens / baskets babas. Victime de la mode. Et puis, adoptons un instant un point de vue totalement objectif et représentons-nous la chose sans concept : cette cambrure, ces courbes de la chaussure, ces douleurs atroces, cela ne représente-t-il pas le BEAU comme objet d’une satisfaction universelle ?
Bref, encore un fail massif de la contradiction dans ma laïfe. Heureusement qu’il y a les ballerines pour la réanimation des pieds dans le coma. Quoi qu’en pensent les hommes, c’est beau les ballerines.
Et bam, un autre problème de nécessité mondiale réglé en trois coups de cuiller à pot. Je vous en prie.
Alors personnellement, je ne me casse la gueule que quand j’ai des chaussures plates, archi-plates. Je dois être un peu comme Goofy, la logique ne passe pas par moi ;-).
Non mais toi c’est différent: tu es un poème!
Ah ah ah pas entièrement faux ;-)