Une grande entreprise littéraire et scientifique s’engage présentement sur ce blogue de la haute substantifique mouelle et de la boulasse intergalactique, j’ai parlé de la classification des types humains post-modernes, ces enfants de la télévision et de l’internet perdus dans le vaste monde néo-libéral de la consommation qui définit ton statut social. La Comédie humaine 2.0. Balzac you’re so screwed.
Le sujet vaste et abyssal des attitudes en soirée a déjà été abordé, quoi que superficiellement, mais il soulevait d’emblée l’un des drames et des questionnements les plus aigus et désolants de notre époque troublée : comment pécho de la meuf ? Le célibat, fléau des temps et des trottoirs, qui fait de la scène matrimoniale une véritable arène où le sang coule à flots avec l’orgueil blessé et les illusions brisées. Notre amie l’insee qui produit à bon escient des chiffres cachant hélas de déchirantes réalités, nous apprend qu’en 2009 un tiers de la population française est célibataire. Oui, cruel destin (mais on se sent moins seul – et puis si on ajoute les célibs avec enfants on arrive à 42%, tremblez familles, la décomposition s’annonce !!!!!)
Bref, c’est la jungle. Le mâle, bien naturellement sous-équipé pour résister aux épreuves de la vie, fait de son mieux pour garder la tête hors de l’eau, mais soyons lucides, il s’en sort plutôt mal. Lointain est le temps où Cyrano déblatérait des alexandrins au pied du balcon. Aujourd’hui, le gaillard se fait relou. Mais pas toujours dans le même style.
Voici donc, honorés lecteurs, une classification ascendante hiérarchique issue d’une enquête minutieuse menée auprès d’un échantillon représentatif de la population française de plus de 3000 personnes sur internet et les forums sur la drague. Deux grands types peuvent être dégagés, suivant la fondation du processus de drague : broderie verbale sur du vent dans les branches de sassafras, ou explicitation d’éléments matériels. Nous aborderons donc d’abord le pipeautage, baratin, verbiage, jacassement, caquetage, parlage et racontar dont nous abreuve la gent masculine jusqu’à plus soif.
(Oui, au fait, vous savez que c’est un peu agressif tout ça ? Pensez-vous que VRAIMENT on aime se faire traiter comme un poisson au bout d’une ligne ? Scrogneugneu, un peu de self-control, bande de bonobos en déroute !)
Le mythomane. Ce type est heureusement relativement peu répandu, quoi que tous les mecs aient un jour rêvé de se faire passer pour pilote d’hélicoptère ou agent secret. Sommes-nous, pauvres naïves, assez bécasses pour tomber dans le panneau ? Eh bien, après deux minutes de réflexion, oui, on a tendance. J’avoue que le James Bond, je vais pas trop réfléchir deux minutes avant de dire oui. Cela dit, c’est James Bond. Pas Jean Dupont, au service de la Fran-an-an-ance. Dans la même veine, il y a bien entendu aussi le jeu sur la corde sensible : il me reste 3 jours à vivre et autres billevesées faisant appel à notre nature d’infirmière, qui hélas est encore trop répandue parmi la populace féminine – d’autant que l’être masculin tend assez généralement vers l’hypocondrie, ce qui fait qu’il est bien content quand on lui dit oh mon pauvre, là tu as vraiment TRÈS mal ? C’est affreux, j’espère que tu ne vas pas mourir ! (Va te prendre une semaine de règles dans ton bide et on en reparle, gars) Bref. Ce type de drague est bien évidemment fort dangereux car il repose sur un vide si abyssal que l’individu ne peut vouloir vous pécho que pour quelques jours, voire même pour tirer un p’tit coup vite fait. A envoyer aux oubliettes direct.
Exemplification. Le héros personnifiant ce type à la perfection est bien entendu Barney Stinson, l’homme dont la lunette de chiottes se relève automatiquement après que t’aies fait tes besoins pour te faire comprendre que la féminité n’est pas la bienvenue. De Lorenzo von Matterhorn, jet-setteur au sexe si gros que même la chirurgie ne peut plus rien faire pour lui au cosmonaute de la « secret NASA, the SNASA » qui est allé sur la smoon, en passant par le pénis qui exauce les vœux et le plongeur entraîneur des forces spéciales pour former des dauphins kamikazes, reconnaissons que le personnage est inventif. See you on the smoon, guy.
Le relou de la rue. Oh oui, c’est bien lui le plus rustre et le plus désagréable, quand tu marches dans la rue sans rien demander à personne, la tête pleine d’arc-en-ciels, de papillons ou de bisounours (OUAIS, ET ALORS??), il te repère en scrède, planqué à sa terrasse de café ou négligemment adossé à son scooter, et te balance une phrase plus moisie qu’une nèfle qui a passé deux mois dans le purin, mais qu’il doit sans doute imaginer spirituelle mais qui est d’une lourdeur plombesque pour le moins. Je dois avouer que c’est une de mes grandes interrogations : comment le mec peut-il penser un instant qu’il a la moindre chance de réussir ? Peut-être ce type de drague est-il l’indice qu’il reste une once d’optimisme au fond du cervelet obtus des mâles les plus abrutis, et que la race humaine n’a pas encore totalement abandonné la foi dans un monde meilleur ? Cela dit, une seule réponse dans ce cas: DÉ-GA-GE.
Exemplification. Vous êtes charmante mademoiselle (l’approche de base du type. Mais dégage !! Vraiment!!) Variante : vous avez de beaux yeux/jambes/visage etc. etc. Je suis perdu. Je cherche le chemin pour atteindre votre cœur. Vous pourriez m’aider ? Je t’ai aperçu plus d’une fois et je dois dire que j’ai trop kiffé ton style, donne moi ton numéro de téléphone et je t’appelle pour qu’on se fasse un petit plan plage Vous êtes une sorcière? Parce que vous venez de m’envoûter! « Excusez moi mademoiselle, vous êtes en état d’arrestation » ; « Pourquoi ? » ; « Pour délit de beauté sur la voie publique ! » Salut, dis je t’ai pas déjà vu quelque part? Ha oui c’était dans mon dernier rêve.Le droit au pieu. « Viens dans ma cellule », aurait-on dit au XVIIIe siècle (et j’ai envie d’ajouter : que je t’enc…, mais ce serait vraiment de mauvais goût). Cet individu, sûr de lui et de conclure, ne s’embarrasse pas de fioritures et produit un discours fait de vantardise liée à la taille supposée de son organe et de domination mal dégrossie ainsi que de persuasion que toutes des salopes sauf maman. La cible se sent infiniment respectée, inutile de le préciser. N’en attendez que pouic, mais si ça se trouve il peut être délassant tout à fait ponctuellement.
Exemplification. J’aimerais être ton gant de toilette Alors que j’achète un billet de train à une borne automatique : « Eh, mademoiselle, prends un tarif handicapé ! Parce qu’une fois que je t’aurai démontée tu pourras plus marcher droit. Oh vas-y fais pas la gueule, j’te rends service ! » (Moi : T’as pas une clope s’il te plaît ?) Il commence à défaire sa ceinture. (Moi : Non, je t’ai juste demandé à fumer.) « Bah tu peux toujours tirer là-dessus mais c’est pas de la fumée qui va sortir ! » Tu as déjà fait l’amour dans une boite de nuit ?Ce type peut se décomposer en un sous-type, l’expert en érotisme, qui tentera de faire montre de son savoir-faire supérieur en la matière par divers biais plus ou moins légers, de « tu connais les boules de geisha » à « j’adore Bataille« . Le but est le même, bien entendu, mais enfin l’approche est un peu plus cotonneuse. Cela dit, avoir lu Bataille ne garantit RIEN. Qu’on se le dise.
La charrue avant les bœufs. Lui, il se voit déjà à ton bras devant l’autel, il est sûr que tu es la future mère de ses enfants, deux minutes lui ont suffi pour lire dans tes fesses yeux le bel avenir qui se déroule devant lui. Détails que votre absence de points communs ou le fait qu’il n’aie pas bien retenu ton prénom. C’est le love at first sight. Crédibilité: maximum s’il est en pleine crise psychotique; absolument nulle dans tous les autres cas. Comme je l’ai déjà précisé à de nombreuses reprises: un homme peut te parler mariage et bébés, tant que t’as pas le polichinelle dans le tiroir c’est pipeau et compagnie. A éviter.
Le complimenteur litotique. Oui, rappelez-vous vos cours de français de première les enfants, cette magnifique figure de style qu’est la litote, le downsizing, l’art du retournement et de la sous-estimation. Le point de départ du complimenteur litotique est de se dire qu’il faut produire des compliments à la portée de la cible, car après tout nous sommes des êtres humains, et puis le coup de « Tu es comme le vent qui fait chanter les violons et emporte au loin le parfum des roses », c’est un peu fort de café dans l’ensemble. Donc, ce madré dragueur se repositionne sur un terrain plus crédible où la fille pourra se dire : « bon sang mais c’est bien sûr : il ne me dit pas que je ressemble à Kate Moss mais à une hôtesse de l’air des années 60, donc il le pense vraiment. » Naïves gourdes que nous sommes. Attention, car le complimenteur litotique est redoutable. REDOUTABLE. Ne le sous-estimez pas.
Exemplification: ce magnifique sketch de Flight of the Conchords (à voir ici), « mannequin à temps partiel » You’re so beautifulYou could be a waitress
You’re so beautiful
You could be an air hostess in the 60s
You’re so beautiful
You could be a part…time…model. (Tu es si belle, tu pourrais être serveuse, une hôtesse de l’air des années 60, tu pourrais être un mannequin…à temps…partiel)

Le juste ringard. Le pauvre, l’innovation, Schumpeter, la compétitivité, tout ça il ne connaît pas. Il est resté un peu coincé aux années 1950 et ses compliments sentent le ranci. La métaphore naturalisante est son terrain favori (il te compare au soleil, à la lune, au diamant, aux plantes et autres joyeusetés chlorophyllesques). Le zazou est presque trop branché pour lui. On est quand même un peu blasées, à dire le vrai. Un peu d’imagination, que diable! Aucune créativité donc, mais un bon point: potentiellement transformable en jouet docile si l’on exploite convenablement le complexe d’infériorité qui devrait en découler (s’il n’en a pas, lâchez l’affaire).
Exemplification. Il n’y a pas de soleil aujourd’hui, et pourtant à vous voir je suis ébloui. Si l’amour était une goutte d’eau, je t’offrirais l’océan. Ton père a pris toutes les étoiles pour les mettre dans tes yeux.L’intéressé par ta personne. Ta vraie personne intérieure. Non non non il n’a pas du tout remarqué que tes seins ressemblent plus à des obus qu’à des œufs au plat. Enfin, théoriquement il est sur la bonne voie: il te pose des questions et fait mine d’écouter avec le plus grand sérieux. Là, tu frétilles et tu te dis: oh yeah, je l’aime bien lui, dis-donc. Et là, horreur malheur dévastation et enfer, il te pose les questions FATIDIQUES: Et elle parle de quoi ta thèse? Tu la finis bientôt? NOOOOOOOOOOOON. Tu n’aurais pas dû, petit scarabée, tu n’aurais pas dû.
Oh oui je sais, des fois les femelles ne sont pas gérables, elles non plus. Rien à cirer, les enfants. Parce que nous le valons bien, non mais.
Merci à I & J, inspirateurs inspirés et dragueurs de feu (mais non typés).
Tu as vraiment demandé une clope au type de la borne SNCF???
Rendons à César ce qui est à César: les exemples sont issus d’excellentissimes forums de l’internet qui diffuse la connaissance dans le monde, dont notamment « paye ta shnek », dont vous me direz des nouvelles.
http://payetashnek.tumblr.com/
un post de la boulasse intergalactique
La boulasse gagne du terrain.