Légère hyperbole : j’ai fait du ski pris des brouettes durant une heure bien sonnée puis, face à l’évidente mauvaise volonté des éléments déchaînés (une légère nappe de brouillard), je me suis repliée au refuge d’où je contemple, avec un mépris mêlée d’une envie de meurtre, des hordes de skieurs déchaînés. Ils gravissent certes, les salauds, avec l’aisance du cygne sur l’eau, des pentes enneigées qui sont pour moi plus qu’un Everest, un Annapurna, un K2 (i.e. pas folle la guêpe, il s’agit ici de ski de fond de type « skating », ce qui nous fait une belle jambe et un nombre certain de bleus au cul), mais J’AIMERAIS BIEN VOIR LEUR GUEULE dans le métro parisien à l’heure de pointe. Pas que je m’y sente moi-même ultra à l’aise cela dit. Sa mère la pute. J’en viendrai presque à considérer que le monde m’en veut. Mais Dieu merci ma force d’âme surpasse ces billevesées.
Le ski donc. Je précise bien entendu que j’étais, ce matin encore, pure et vierge de ski. Ajoutons que je conchie le sort, victime d’un destin tragique. Ce soir, je suis souillée à jamais. Cela dit, quand tu arrives sur les pistes : c’est beau. Faut-il pour autant se casser le cul à tenter de rester vaguement debout avec aux pieds deux planches plus glissantes qu’une plaque de verglas moscovite ? JE POSE LA QUESTION. Le moment d’enfiler tes skis et sans transition tu as compris ta douleur. Après avoir péniblement réussi à te dépêtrer des fixations et diverses lanières afférentes au matériel de ski (circa dix minutes), tu constates non seulement que tes compagnons ont pris 200 mètres d’avance (distance que tu mets circa vingt minutes à parcourir), mais aussi que ces putains de planchasses que tu t’es fixé aux pieds sont sacrément instables. Sur la piste les skieurs vont vite. Très vite. Trop vite. À une vitesse trop élevée pour être honnête. Une vitesse morbide en quelque sorte. On parle souvent des morts au volant ou au Bataclan, mais ne peut-on pas imaginer qu’un complot mondial mené par le pape, Michel Platini et Céline Dion vise à nous cacher la vérité sur la mortalité au ski ?

Théoriquement tu fais comme ça. THEORIQUEMENT.
Ah tiens, un autre débutant passe au loin à l’horizon (une centaine de mètres). On se sent moins seule dans son allure pataude qui rappelle l’humanité à sa condition de canard. Ta vitesse de pointe tourne autour de celle de la tortue anémique, ce qui ne t’empêche pas de te vautrer la gueule comme une merde une dizaine de fois de rang sur ce coccyx dont tu aurais vraiment préféré continuer à ignorer l’existence jusqu’à ta mort paisible DANS UN LIT et merci bien. Tu constates amèrement que l’ample rembourrage de ton cul n’est d’aucune utilité whatsoever, puisque tu chutes en général directement sur l’os ; le monde est bien fait dans sa vile perversité.
Un enfant de quatre ans vient de te dépasser à une vitesse supersonique ; le sentiment profond de ta nullité consubstantielle te pousse à balbutier « pardon, pardon » à chaque fois (toutes les 3 secondes) qu’un skieur te dépasse, excuse que le skieur gêné ignore d’un silence méprisant.
Gross malheur, ce jour de souffrance pour ton cul et ton ego est en outre celui qu’une bande d’enculés a choisi pour organiser une course de gamins sur la piste verte. Imaginez les conséquences. D’une part, impossible de skier sur la piste verte – enfin skier, je me comprends, disons plutôt ahaner en faisant de faibles tentatives de translation dans l’espace. De plus, une bande de mômes que tu materais sévère en leur foutant recta une interro surprise se paie le luxe de te ramener à ton statut social de Parisienne au gros cul mou en filant comme des flèches sur la piste que tu es censée traverser. Autour, les parents et entraîneurs te hurlent dessus d’un air indigné « Vite ! Ne gênez pas le passage ! », ce qui a évidemment pour effet de précipiter ta chute et te force à ramper telle une limace handicapée vers le bord de la piste afin de laisser le champ libre à des chiards du tiers de ton âge.
HUMILIACIÓN.
Au bout de 500 mètres, le refuge : dernier endroit civilisé où l’on vend du vin chaud et de la tarte aux myrtilles devant un feu ronflant, et où l’être humain de bon goût peut méditer sur la grandeur des résistants du maquis du Vercors. On peut même regarder les enfants filer au loin en s’imaginant que c’est hyper facile, en fait. Heureusement que j’ai pris les mémoires de Zlatan pour passer le temps. Et sinon ce soir je rentre à pied jusqu’au parking. Merci bisous lol.
Et la bonne année.
Perso j’ai fait une croix sur le ski après 2 séjours et environ 78 essayages de godasses de ski de location qui puent le fromage car mon cou de pied est trop fort pour que le sang passe dans mes orteils ( mes pieds se transforment donc en moignons douloureux de l’enfer dès que je ferme une grolle ).
Le pire dans tout ça, c’est de rester bloquée à 3200 mètres d’altitude, sur une piste bleue que t’avais bien dit à tes potes que tu la sentais pas celle-là bordel, et qu’une connasse de tempête de neige se pointe. Tu vois pu tes pieds ( autant dire que tu vois pu les autres skieurs – pis comme eux ils skient bien ils sont déjà en bas de toute façon ), tu te gèles les miches, tu as MAL (euphémisme) aux ieps , ta morve se transforme en stalactites, et comme tu chiales dans ton masque de ski tes larmes gèlent instantanément. Tu n’as plus qu’à poser ton cul par terre, immobile, sans savoir où tu es, et attendre.
Me suis jamais sentie aussi seule ( et conne ) de toute ma vie. Bref, vive le ski.
Aïe!!! Compassion totale!
Haha ça donne envie tout ça… non mais le ski il faut essayer plusieurs fois, ne pas rester sur un traumatisme. J’y suis allée plusieurs fois et bon, je suis loin d’être une pro mais je me suis amusée quand même. En tant que femme il faut juste être prête à enterrer une partie de son sex-appeal sous une vieille combi de la crème solaire et de la morve gelée. Peut-être une partie aussi de sa dignité après la 47 chutes sur les fesses…
Mais je vous assure qu’il y a de bons cotés, les rigolades entres amis, se voir progresser au fil des jours, les beaux moniteurs ect